Argumentaire et appel à communications Au-delà d’un usage de l’anglais comme lingua franca désormais bien établi, les individus vivent des expériences plurilingues diverses qui prennent place dans de nombreux contextes (professionnels, académiques, relationnels, de loisirs, que ce soit en ligne ou en présentiel) et qui témoignent du caractère multilingue des interactions caractéristiques du monde d’aujourd’hui (Kalaja & Melo-Pfeifer, 2024). Cette pluralité se retrouve dans de nombreuses offres de formation en langues à l’université. Les différents cursus proposent en effet dans leurs maquettes des options de langues ou des enseignements dits d’ouverture ou transversaux que les étudiants peuvent décider d’investir pour découvrir de nouvelles langues-cultures. Si ces enseignements à choix offrent aux étudiants la possibilité de poursuivre une langue apprise dans le secondaire, ils peuvent également, pour beaucoup, représenter l’opportunité de débuter des langues encore jamais apprises. Dans certains cursus, par exemple en didactique du français langue étrangère, cette opportunité prend la forme d’une expérience vécue dans une visée réflexive à travers la rédaction de journaux d’apprentissage (Cadet, 2007). On peut observer en effet dès le début des années 1980, un intérêt pour « l’expérience d’un sujet au sein de la classe, qu’il soit à la place de l’enseignant ou de l’apprenant » (Cicurel, 2015 : 38). Plus largement, la pluralité linguistique de l’offre de formation en langues à l’université donne lieu à des choix personnels différenciés et à des expériences d’enseignement-apprentissage d’une grande diversité. C’est ce terrain particulier de l’enseignement-apprentissage d’une langue débutée, et de son usage, qui est au coeur de l’action de recherche ALADUN (enseigner/Apprendre les LAngues Débutées à l’UNiversité)au sein du laboratoire Lidilem, et que nous proposons d’explorer dans le cadre du colloque à travers le prisme de l’expérience vécue. L’importance de la dimension expérientielle a pu un temps être occultée par le caractère utilitaire associé aux compétences décrites et mises en avant dans le Cadre européen de références pour les langues (Longuet & Springer, 2021) ; elle est à nouveau mentionnée dans des publications récentes qui rappellent notamment la place de l’expérience vécue dans les modèles didactiques existants (Puren, 2022) et soulignent que « le paradigme de l’expérience est incontournable aujourd’hui en didactique des langues » (Rivière, 2019 : 106). L’expérience de la langue est reliée au vécu des apprenants, à travers différentes formes que Puren qualifie de « composantes notionnelles » de l’expérience, citant entre autres l'authentique, le spontané, l’affectif, l’émotionnel, le plaisir, le relationnel, l’interactif, ou encore par le biais des approches pédagogiques mobilisant une dimension artistique, imaginative ou artistique (Puren, 2022). Ces dimensions font écho à des travaux s'intéressant aux imaginaires associés à l’enseignement-apprentissage des langues (Muller, 2021), à la place et au rôle du corps et des émotions (Eschenauer, Tellier & Zapa, 2022) ou à l’apport de pratiques artistiques (Aden, 2008). On peut inclure dans cette mouvance les approches biographiques (Molinié, 2013) qui mettent en lumière les expériences vécues par le sujet. L’expérience linguistique enfin, comprise comme un usage répété rendant possible une certaine intimité avec la langue apprise, peut également être vue comme un moyen et une occasion de considérer l’objet-langue autrement qu’à travers des descriptions formelles ou conceptuelles, c’est-à-dire en accordant une place à la dimension affective, familière et expressive de la langue (Saussure, 2024). La pratique de la langue apprise participe de la constitution d’un imaginaire, du développement d’une familiarité avec la langue-culture et peut susciter des émotions (positives ou négatives) constitutives de l’expérience langagière comme de l’expérience d’apprentissage (Guedat-Bittighoffer & Dewaele, 2024). On pourrait penser que des expériences d’usage situé – les expériences de mobilité par exemple – concernent rarement des publics d’apprenants débutants et les possibilités de contact avec des locuteurs ou des ressources langagières disponibles hors du cours pour d’autres langues que l’anglais sont d'ailleurs rarement évoquées dans les travaux s’intéressant aux activités informelles. Cependant, les contacts avec des locuteurs ou des éléments culturels de la langue-cible peuvent tout aussi bien relever d’expériences vécues quel que soit le niveau de compétence acquis. Le colloque pourra ainsi également donner l’occasion de mettre en lumière des expériences liées à l’usage de la nouvelle langue en cours d’apprentissage à l'université dans des circonstances ou situations dépassant le cadre du cours. Si l’expérience vécue est souvent centrée sur l’apprenant, on ne saurait négliger la perspective des enseignants, qui peuvent, eux aussi, vivre une expérience d’enseignement particulière avec un public d’apprenants débutants. Se posent alors des questions liées aux représentations à construire ou déconstruire, aux postures adoptées, à la planification didactique et à l’agir sur le terrain. Il s’agira donc, dans le cadre du colloque, d’appréhender les débuts d’un apprentissage langagier nouveau et la découverte d’une langue-culture sous l’angle du vécu en explorant différentes facettes de l'expérience qui peut en être faite, aussi bien par les apprenants que les enseignants. Celle-ci peut être recueillie à travers des corpus variés (entretiens, questionnaires, journaux d’apprentissage, carnets de bord d’enseignants, retours d’expérience, séquences de cours filmées…). D’un point de vue apprenant, l’expérience vécue peut concerner :
L’expérience pourra également être appréhendée du point de vue enseignant et porter sur :
Les propositions pourront s’inscrire dans un ou plusieurs des thèmes évoqués, la liste n’étant pas exhaustive. Le colloque aspire à être un lieu de réflexion et d’échanges à partir de travaux de recherche ancrés dans le terrain et les pratiques. A ce titre, les communications fondées sur des approches participatives ou collaboratives (Miguel Addisu & Thamin, 2020) sont encouragées. Les propositions de communication orale pourront concerner toute langue apprise et enseignée à l’université. Nous acceptons des résumés rédigés dans les langues suivantes : anglais, espagnol, français, italien, portugais. Les communications orales devront être présentées dans une des langues mentionnées ci-dessus et les diapositives être rédigées en français. Références bibliographiques Aden, J. (dir.). (2008). Apprentissage des langues et pratiques artistiques. Créativité, expérience esthétique et imaginaire. Paris : Éditions Le Manuscrit. Cadet, L. (2007). La genèse des « journaux de bord d’apprentissage ». Le français aujourd’hui, n° 159(4), 39-46.https://doi.org/10.3917/lfa.159.0039 Cicurel, F. (2015). De l’interaction à la réflexivité : inventivité des pratiques et ressources pour l’action. In Defays, J.-M. (dir.). Faits et gestes de la didactique du français langue étrangère et seconde de 1995 à 2015. (pp. 37-52). Louvain-la-Neuve : EME éditions. Eschenauer, S., Tellier, M., & Zappa, A. (2022). Encorporer les langues vivantes : Reconnaître la place du corps pour enseigner et pour apprendre. TIPA. Travaux interdisciplinaires sur la parole et le langage, (38). https://doi.org/10.4000/tipa.4790 Guedat-Bittighoffer, D. & Dewaele, J.-M. (2024). Fluctuations des émotions éprouvées par des apprenants débutants dans cinq cours de Français Langue Étrangère : Une étude de cas multiples. Language, Interaction, and Acquisition, 14 (2), 279-305. Longuet, F. & Springer, C. (2021). Autour du CECR - Volume complémentaire (2018) : médiation et collaboration. Une didactique de la relation écologique et sociosémiotique. Paris : Éditions des Archives Contemporaines. Kalaja, P. & Melo-Pfeifer, S. (dir.) (2024). Visualising Language Students and Teachers as Multilinguals: Advancing Social Justice in Education. Bristol: Multilingual Matters. https://www.jstor.org/stable/jj.20558241 Miguel Addisu, V. & Thamin, N. (dir.) (2020). Recherches collaboratives en didactique des langues. Enjeux, savoirs, méthodes. Recherches en didactique des langues et des cultures, 17(2). https://doi.org/10.4000/rdlc.7272 Molinié, M. (2013). Une didactique des langues à l’épreuve de l’expérience mobilitaire, plurilingue, (trans)formative. Habilitation à diriger des recherches. Paris : Université Sorbonne Nouvelle. https://hal.science/tel-02561109 Muller, C. (2021). Imaginaire et pratiques d’enseignement/apprentissage des langues. Pour une focalisation sur l’expérience intersubjective. Habilitation à diriger des recherches. Paris : Université Sorbonne Nouvelle. https://theses.hal.science/LIDILEM/tel-04691413v1 Puren, C. (2022). L’ « expérientiel » en didactique des langues-cultures. Essai de modélisation. [En ligne] <https://www.christianpuren.com/mes-travaux/2021c> Rivière, V. (2019). Le champ de l’interaction en didactique des langues : discours, pratiques, formation. Explicitation d’un cadre d’analyse et illustration par une recherche-formation.Habilitation à diriger des recherches. Cergy : Université de Cergy-Pontoise. https://hal.science/tel-02411358 Saussure, L. D. (2024). Aimer une langue : de l’expérience linguistique à l’attachement. Études de lettres, (323), 21-42. Le colloque se tiendra en présentiel uniquement. Propositions de communication Les propositions de communication de 500 mots (max. 5 références bibliographiques) sont à déposer sur le site : https://aladun2025.sciencesconf.org/ |
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